Simon De Valois, dit "Saint Simon"

09/08/2021

L’ENFANCE DE SIMON

Saint-Simon naquit vers l’année 1048 au château de Crépy-en-Valois d’une famille puissante, apparentée à Charlemagne et à Charles Martel. Sa mère, Adela, fille du Comte de Bar-sur Aube, mourut en 1053, et son père Raoul III, remarié peu après à Eléonore de Montdidier, ne tarda pas à divorcer pour épouser Anne de Russie, veuve de Henri Ier, Roi de France.

Dans ces circonstances, l’éducation du jeune Simon eut certainement été sacrifiée, sans le dévouement de sa tante Mathilde, épouse de Guillaume le Conquérant, qui le prit à la Cour de Normandie et fut pour lui une véritable mère. Pendant qu’elle formait son cœur à la piété, Guillaume l’initiait lui-même à la chevalerie, au métier des armes et à la science de la chasse. Simon avait un caractère heureux, une intelligence vive. Son esprit guerrier, son adresse corporelle, tout annonçait pour l’avenir un gentilhomme accompli. Simon savait être maître de lui, et à se vaincre, il se sentait un autre homme, ayant à cœur de devenir une première ébauche de saint.

LE RETOUR DE SIMON A CREPY

Simon revint à Crépy en 1067 mettre son intelligence et sa force au service de son père Raoul III. Celui-ci n’était plus le prince qui avait scandalisé le peuple par son divorce et son remariage : le regret du passé, la mort d’Eléonore, sa seconde femme, avait contribué à le réconcilier avec l’Église. Simon était toujours associé à ses bonnes œuvres : peu à peu se développait en lui l’amour de Dieu et des hommes.

LA GUERRE ENTRE SIMON ET LE ROI DE France ET SA VOCATION POUR DIEU

Mais le 22 février 1072 le Comte Raoul III mourait laissant à son fils Simon, âgé de 24 ans, la responsabilité de vastes domaines : le Comté de Crépy, celui de Vexin et d’Amiens, celui de Bar-sur-Aube, le titre de Gardien et Porte-Etendard de l’Oriflamme de Saint-Denis, une cour magnifique, en bref, de quoi faire tourner une tête moins bien équilibrée. Le Roi de France, Philippe, dévoré du désir de mettre la main sur ce riche héritage, et persuadé qu’il serait facile de venir à bout d’un jeune homme sans conseil et sans appui, tendit à Simon des embûches secrètes puis lui déclara une guerre ouverte : les campagnes et les villes furent livrées à une horrible dévastation.

Simon tint tête à ses ennemis pendant trois ans déclarant qu’il ne se retirerait point avant qu’on ne lui ait rendu ses propres domaines. Au milieu de cette guerre, Simon reçut une grâce qui le dégoûta à jamais des grandeurs de la terre. Le cadavre de Raoul III fût ramené de la ville de Montdidier à l’église de Saint-Arnoul de Crépy, lieu de sépulture ordinaire des comtes de Valois. En présence du corps de son père autrefois si puissant et si fier, Simon fut pénétré du néant des gloires humaines. Quoique fort occupé au dehors par les affaires de la guerre, il s’appliqua au dedans au maniement des armes du Seigneur et au combat spirituel. Il jeûnait, priait, visitait les églises, distribuait secrètement aux pauvres les mets recherchés qu’on préparait pour sa table. Simon songeait déjà à se retirer dans quelque monastère, lorsque, pendant une nuit de fièvre, Saint-Arnoul et Saint-Oyend lui apparurent et l’invitèrent à se retirer dans le Jura pour s’y consacrer au service de Dieu. Se réveillant aussitôt et ne se sentant plus malade, Simon se mit à crier d’une voix forte : « Je suis guéri, mais où sont donc les trois seigneurs qui étaient ici? Que sont-ils devenus? » Simon fut frappé par cette vision. La guerre qu’il faisait, lui apparut non plus dans son principe qui était juste mais dans ses conséquences lamentables pour de trop nombreuses victimes.


Il partit pour Rome afin de consulter le Pape. Grégoire VII lui conseilla la conciliation et de gouverner fidèlement ses États jusqu’à la conclusion de la paix avec le Roi de France. Il délégua même Hugues, Évêque de Die en Dauphiné, et Hugues, Abbé de Cluny pour servir de mandataires au jeune Comte et arranger le différent au mieux des intérêts de chacun, vers 1074.

Mais le Roi de France demeura intraitable, et la guerre reprit de plus belle jusqu’en 1075, époque à laquelle sur de nouvelles instances des Évêques et des grands du Royaume, la paix fut enfin signée, rendant à Simon tous ses biens, et faisant de lui, après le Roi, le plus riche et le plus puissant seigneur de France.

Mais l’idée de se consacrer à Dieu prenait de plus en plus corps dans l’esprit de Simon. Dès 1075, il fondait dans la vallée de l’Aube dix ou douze prieurés qu’il concédait à Saint-Oyend de Joux.

LES PROJETS DE MARIAGE

Ignorants de son désir, les parents de Simon lui proposèrent d’épouser la fille d’Hildebert, Comte de la Marche d’Auvergne. Simon partit pour l’Auvergne, mais dans ses entretiens avec la jeune fille, il parla plus de l’amour de Dieu que de l’amour humain, et la jeune fille se retira dans un couvent près de la Chaise-Dieu. Hildebert fut peiné et surpris et se confondit en excuses auprès de Simon, qui expliqua au père le comportement de sa fille : « Cessez de vous attrister, votre fille a suivi celui qu’elle a aimé plus que tout autre ; elle s’est réfugiée dans un cloître pour se consacrer à Jésus. »

L’oncle de Simon, Guillaume Le Conquérant rêvait de l’avoir pour gendre, pour fils adoptif et pour héritier, de préférence à tout autre. Simon objecta la parenté qui l’unissait à Mathilde, femme de Guillaume, et demanda pour trancher les difficultés de recourir au Pape. Guillaume y consentit, et Simon se mit en route pour Rome avec quelques compagnons en 1077. Rome n’était que le prétexte de son départ ; le Saint-Oyend de la vision devait être le terme du voyage.

SEJOUR AU MONASTERE DE SAINT-OYEND

Annoncé par deux gentilshommes : Raoul et Francon, accompagné de ses amis Robert, Arnoul et Garnier, décidés comme lui à embrasser la vie religieuse, Simon se présenta à Odon, Abbé du Monastère jurassien en 1077, et fut accueilli avec enthousiasme : l’égal du Roi ensevelissait ses titres et dignités sous la robe de moine … Quel exemple pour tous ceux qui l’auraient comme compagnon !

Simon se donna tout entier à sa vocation, pratiquant l’obéissance et l’humilité, et Dieu le combla de grâces extraordinaires. L’Abbé Odon songea alors à donner à Simon une place d’honneur au Chapitre. Le jeune moine obéit, mais reprit bientôt sa première place, humble et oublié dans la Communauté des Moines. Mais le séjour de Simon au Monastère de Saint-Oyend ne fut que de courte durée. Gêné par l’affluence continuelle des visiteurs et par les honneurs dont il était l’objet, il rêvait de solitude plus complète pour pratiquer la règle dans son intégrité. Il alla trouver l’Abbé et obtint la permission de partir.

CREATION D’UN MONASTERE A MOUTHE

Avec quelques compagnons au courage et à la foi robuste, Simon s’enfonça dans les hautes montagnes du Jura (début 1078) et arriva après plusieurs journées de marche à la Source du Doubs, traversa la rivière et rencontra une éminence, ou Motte, entourée d’eau qui faisait de ce lieu un endroit favorable à l’habitation. Simon et ses compagnons se bâtirent un pauvre monastère avec les sapins abattus, défrichèrent, semèrent, mais surtout vécurent dans le jeûne et la prière. L’oratoire tout proche fut dédié par Simon à l’Assomption de Marie. Dans cette maison au milieu des champs, les moines vivent pauvrement et durement, faisant l’aumône, soignant, guérissant… Le renom de Simon s’étendait et lui attirait des visiteurs. Il n’était pas non plus oublié dans le monde, et un message de Hugues de Cluny, son ancien conseiller, l’amena à quitter momentanément Mouthe pour aller trouver le Roi de France et lui demander de restituer au Monastère de Cluny les terres que Simon avait données et que le Roi avaient usurpées. Arrivé à Compiègne, Simon fut vite reconnu, entouré, acclamé et porté en triomphe au Palais du roi Philippe Ier qui ne put que souscrire à toutes les revendications qui lui étaient adressées. Le lendemain même, Simon gagna la Normandie pour s’interposer entre Guillaume le Conquérant et son fils Robert qui se battaient l’un contre l’autre. Il y réussit parfaitement et revient à Mouthe où il resta deux ans environ, jusqu'à ce que le Pape Grégoire VII l’appelle à Rome.

Le Pape était en guerre avec Robert Guiscard et les Normands, et avait besoin du secours de Simon qui ne partit que par obéissance. L’accueil réservé à Rome à Simon et à ses compagnons fut très aimable. Malheureusement, la malaria emporta la plupart des compagnons de Simon, sauf un seul… Le saint moine amena le prince Robert Guiscard à conclure la paix avec le Pape vers 1080. Simon, sa mission accomplie, ne demandait qu’a rentrer à Mouthe, mais Grégoire VII voulut le garder à Rome. Simon tomba malade. Le Pape vint le visiter et le confesser, et le 30 septembre 1080, le saint mourait. Grégoire VII voulut que Simon soit inhumé dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Sa tante Mathilde lui fit élever un magnifique tombeau et le Cardinal Odon de Châlons-sur-Marne devenu le Pape Urbain II lui composa l’épitaphe suivante : « Simon est mon nom ; mes ancêtres étaient de race illustre. Parmi les grands de France, j’ai joué un rôle important. Par amour de la pauvreté, j’ai quitté mon pays et le monde, préférant le Christ à toutes les richesses. Puis à la Cour Apostolique du Chef des Chrétiens, je suis venu, poussé par un amour intense d’un tel père. A sa suite, puis-je mériter enfin d’être porté aux cieux, moi dont la dépouille est ici conservée devant les portes sacrées du temple. »

La mort de Simon fut désolation pour Mouthe, privé de son fondateur. Son œuvre fut pourtant continuée par Robert, le seul de ses compagnons épargné par la maladie à Rome. Le corps du religieux ne demeura pas longtemps à Rome. Sa sœur Adala, Comtesse de Vermandois, en demanda le transfert à l’Abbaye de Saint-Oyend. Une relique de Saint-Simon de Crepy est conservée dans l’église de Mouthe dans un reliquaire en forme de bras.